“We’re Spinal Tap from England.
You must Be the U.S.A.”
Vrai film culte et faux documentaire, This Is Spinal Tap est un long métrage à part. Ne raconte-t-on pas qu’en le regardant Ozzy Osbourne (le chanteur de Black Sabbath) en a pleuré tant le film tapait juste sur la vie des rockers en général et celles des musiciens métalliques en particulier ?
Réalisation : Rob Reiner
Scénario : Christopher Guest, Michael McKean, Harry Shearer, Rob Reiner Distribution :
Année : 1984 |
This Is Spinal Tap appartient à un genre particulier de la comédie, le mockumentaire, un mot valise forger à partir de l’anglais to mock (moquer) et documentary (pas besoin de traduire, non ?). Un mockumentaire est donc un faux documentaire, il en reprend les codes pour les pasticher, qui vise à faire rire. Ce genre a récemment été illustré par des films comme Borat ou bien encore Vampires en toutes intimités (What We Do In The Shadows). Le très noir C’est arrivé près de chez vous (1992, déjà) appartient à cette même catégorie.
C’est au rockumentaire, le documentaire sur le Rock, que This Spinal Tap emprunte son vocabulaire et sa grammaire filmique. On y suit la tournée foireuse d’une vieille gloire du Hard Rock et du Heavy Metal, le groupe Spinal Tap, qui cherche à reconquérir les Etats-Unis. A mesure que la tournée progresse les concerts sont annulés les uns après les autres ou remplacer par d’autres donnés dans des salles plus petites, ils finiront par jouer sur une base aérienne pour un publique qui n’est pas des plus réceptifs. Ces scènes prises sur le vif, caméra à l’épaule, sont entrecoupés par des séquences d’interviews, avec le réalisateur du documentaire Marti Di Bergi (joué par Rob Reiner qui est le réalisateur du film, vous suivez ?) et d’extraits de concerts.
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Les interviews sont l’occasion de revenir sur la vie de rockers, la collection de guitares du soliste Nigel Tufnel (Christopher Guest), ses amplis qui vont jusqu’à onze là où les autres s’arrête à dix, et de revenir sur la carrière d’un groupe fondé dans les années 60. Ces entretiens carrière, propices à des gags comme le retour forcément émus sur les différentes morts des batteurs du groupe, participe du réalisme du film tant les évolutions du groupe collent à celles d’un Deep Purple.
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Ce qui frappe c’est la justesse du portrait. This Is Spinal Tap ne raconte pas l’histoire d’un mauvais groupe, d’une bande de perdants magnifiques (ou pas), mais celles de types qui ont tutoyé les sommets, ont rêvé et ont cru à leur rêve au point de se battre pour le faire advenir. Les personnages n’échappent pas au ridicule avec leur ego démesuré, mais il en faut pour faire ce qu’ils font, leur bêtise trempée dans la plus douce naïveté. En les voyant on pense à temps de groupes. Ils ont même une blonde Yoko Ono qui s’incruste sur la tournée et sème la zizanie. Il ne manque en fait que la drogue.
Tout est risible des accessoires de scène qui ne fonctionnent pas, du bassiste qui fait biper les portiques des aéroports parce qu’il a un concombre envelopper dans de l’aluminium dans son pantalon quand il n’utilise pas une basse à double manches, du guitariste soliste qui joue de la guitare en en frottant les cordes avec un violon, jusqu’aux débordements Jazz Rock ou aux prétentions à faire de la musique classique.
Film musical This Is Spinal Tap ne manque pas de chansons entêtantes entre délire mystique de leur Stonehenge (une scène hilarante avec des mégalithe riquiqui autour desquels dansent des nains vêtus de vert), la science-fiction et les hymnes hard rock bien gras qui parlent de façons imagées du sexe. Car rappelons-le Spinal Tap n’est pas censé être un mauvais groupe mais un groupe qui ne comprend pas que le monde a changé. La tournée était sensée promouvoir le nouvel album du groupe, Smell The Glove, mais la pochète de celui-ci trop crue et surtout franchement misogyne est refusée par la maison de disque, Polymer Records représentée par Bobbi Flekman (jouée par Fran Drascher) et Sir Denis Eton-Hogg (auquel David McNee prête ses traits et son accent britannique).
Drôle sans être méchant This Is Spinal Tap est une réussite qui mérite son statut de film culte et sa place parmi les meilleurs films rock. C’est un biopic bien meilleur que Dreamgirl, ce même dans sa fin cul-cul la praline lorsque les deux meneurs du groupe, David Saint Hubbins (blond chanteur et guitariste) et Nigel Tufnel (le guitariste), brouillé à jamais se retrouvent pour une tournée au Japon parce qu’une de leur chanson y cartonnent.
R.V.